Année A – 4ème dimanche ordinaire


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HOMELIE

Une antenne ! Je veux être une antenne !!

"Mon petit, on va te dessaler! cette menace, je l'ai entendue de mes propres oreilles, dans là marine, à l'adresse des nouveaux arrivés ; elle m'a été rapportée aussi combien de fois, hélas par des jeunes qui venaient d’entrer au travail, que ce soit au bureau, que ce soit à l'usine.

"On va te dessaler !", cette expression fait allusion à un geste de la liturgie du baptême qui nous était familier autrefois. Pour accueillir un enfant dans la Communauté, des chrétiens, dans la Famille de Dieu, le prêtre refaisait ce geste traditionnel chez les Orientaux, lorsqu'on accueillait quelqu'un pour le repas. Pour mettre l'invité en appétit, on lui of fait, en guise d'apéritif, une pincée de sel lorsqu'il entrait dans la maison, comme aujourd'hui nous offrons des petits gâteaux salés. De même, le prêtre accueillant dans la Communauté ce nouvel élu de Dieu, déposait sur ses lèvres un peu de sel bénit, en demandant au Seigneur qu'il suscite dans le cœur de cet enfant, dans son âme, l'appétit de Dieu et des choses divines, l’appétit de tout ce qui est noble et grand, de tout ce qui rapproche de Dieu. Et, dans la prière qui suivait, le prêtre demandait au Seigneur que cet enfant échappe à la corruption du monde et que le Seigneur ne le laisse pas plus longtemps sans rassasier cet appétit divin.

" On va te dessaler "

Aujourd'hui si un jeune entre au travail avec une foi sincère avec un amour explicite de Dieu, s'il entre au travail avec un idéal, s'il est heureux de pouvoir enfin exercer la profession a laquelle il s'est depuis si longtemps laborieusement préparé, s'il entend l'exercer consciencieusement, s'il porte dans le cœur un grand et beau rêve d'amour, d'amour vraiment humain ! trop souvent on va s'acharner, en effet, pour étouffer en lui tout cela.

Pourquoi cet assaut, pourquoi cette fureur, lorsqu'une âme noble désire monter, lorsqu'un cœur généreux se présente quelque part ?…

La réponse, la voici, elle se trouve en toutes lettres dans le livre de la Sagesse. (ch.2, v.12, 14, 15) " Traquons le juste, puisqu’il nous gêne et qu’il s'élève contre notre conduite... Il nous est un reproche vivant… sa seule vue nous est à charge, son genre de vie jure avec celui des autres, sa conduite est excentrique ! ".

Lorsque nous suivons une mauvaise voie, nous n'aimons pas que l'on vienne nous le dire et encore moins qu’on nous le montre ! Quand quelqu’un a choisi la mauvaise voie, ça l'agace, ça l'ennuie qu'il y ait, à côté de lui, un camarade qui ne suit pas le même chemin. Il voudrait tellement pouvoir se rassurer en se disant : " ce que je fais, tout le monde le fait ! "… Alors on complote contre cet " excentrique ", on va lui tendre des pièges pour le faire tomber, pour qu'il fasse "comme tout le monde.", et l'arme que l’on emploiera de préférence, contre lui, ce sera la moquerie, la dérision, à moins que l'on ne préfère la " mise en quarantaine ".

On s'en prendra à sa foi surtout si elle se double de la pratique religieuse. "Tu n'es pas à la page" ! Tu crois encore à toutes ces bêtises-là ! Tu vas encore "chez les curés" à ton âge ? Tu vas encore à la messe, à ton âge ? Est-ce qu'à notre époque, au 20ème siècle, on peut encore croire à tout cela. Ce sont des contes de fées, des légendes faites pour faire tenir les enfants sages .... Mais un adulte ? !

On s’en prendra à son souci de faire du travail consciencieux. : Tu fais du zèle, mon petit ! pour ce qu'on est payé, tu en feras toujours trop. La règle suprême ici, c'est le système "D", pas vu, pas pris ! Il faudra bien te le mettre dans la tête.

On s'en prendra, avec peut-être encore plus d'acharnement, à son rêve d'amour pur, noble, généreux. Aimer une fille ? c'est s'en faire un instrument de plaisir. Voilà la réalité, le reste c’est de l'illusion, c'est du rêve ... Et je connais des bureaux et des ateliers où celle qui ne veut pas répondre aux avances de son chef de service peut être sûre de n'être jamais inscrite sur le tableau d'avancement !...

"On va te dessaler"

Chers jeunes, qui êtes si souvent en butte à cette "persécution", sachez que le Seigneur vous a placés dans ce milieu parfois si dégradé, si pourri, pour être le " sel ". il vient de nous le dire. Il vous a placés là pour que, par votre attitude, par votre exemple, et même éventuellement par vos paroles, vous réagissiez contre cette corruption. Ayant eu la chance, la grâce de mieux comprendre l'idéal du Christ, possédés par son amour, unis plus intimement à Lui, vous n'avez pas le droit de faiblir ... " Si le sel perd sa saveur, vient de nous dire le Seigneur, il ne sert plus à rien et il mérite d'être piétiné par les autres " ; oui, si vous vous laissez entraîner, vous seriez plus coupables que ces autres qui n'ont pas eu ces mêmes chances…

Pour tenir le coup ! appuyez-vous sur la grâce de votre baptême : que " salé par ce sel symbole " de ta Sagesse, Seigneur, ton serviteur ne soit pas atteint par l'infection des passions mauvaises". C'est la prière que l'Eglise, la Communauté tout entière a faite pour vous par l'entremise de son ministre au jour de votre baptême. Appuyez-vous justement sur cette prière de la Communauté de vos frères : " la force de la prière, de l'émulation, la chaude atmosphère de charité d'une communauté chrétienne, l'honneur de cette communauté à sauvegarder, c'était là, de leur propre aveu, les soutiens de ces pionniers de l'apostolat qui ont lancé la Mission de Paris !

Oui ! c'est l'honneur de cette Communauté chrétienne dont-on sait que vous faites partie, c'est l'honneur du Christ lui-même dont vous prétendez être les disciples, oui, c'est cet honneur dont vous êtes responsables, ne l'oubliez jamais !

Prenez à votre compte ce souci, ce désir des Petites Sœurs de Charles de Foucauld. (Rappelez-vous combien le témoignage de l'une d'elles, nous avait bouleversés) . Elles veulent être présentes dans tous les milieux possibles et imaginables : en usine, au Hoggar chez les Touaregs, chez les Pygmées ; derrière le rideau de fer ou celui de bambous et jusque dans les prisons uniquement pour être, par leur prière muette, par leur présence chrétienne, l’antenne qui réunit à Dieu ces milieux apparemment athées. Rappelez-vous que vous aussi, Dieu vous a placés dans cet atelier, dans ce bureau, dans ce quartier pour être l'antenne qui relie à Lui ce milieu qui, sans vous, serait athée, du moins sans relations explicites avec Dieu. Oui ! vous aussi soyez l'antenne entre le ciel et ce milieu déchristianisé, l'antenne qui, de temps à autre, lance vers le Seigneur une pensée, un acte d'amour muet ou encore un S.O.S. Soyez l'antenne qui relie votre lieu de travail ou d'habitation à Dieu, en apportant vos camarades de travail, ou vos voisins au Seigneur dans la prière, notamment à votre messe dominicale, en Lui parlant de chacun d’eux, en Lui offrant tout ce que vous avez pu détecter de bon et de beau en eux, au cours de la semaine écoulée, en parlant au Seigneur de leurs soucis, de leurs peines et aussi de leurs joies. En implorant, avec Jésus, l’indulgence du Père pour le mal qu'ils peuvent faire, le plus souvent "sans savoir ce qu'ils font".

cette attaque pour "dessaler" les jeunes, aujourd’hui, elle est préparée, orchestrée par l'éducation qu’on leur donne. On apprend des tas de choses aux enfants : on développe leur mémoire, leur imagination ; on développe leur esprit d’observation ... mais les facultés maîtresses, celles qui font un homme et une femme, celles-là, on les laisse s’atrophier. Pourquoi ? Parce que c'est gênant d'avoir affaire à un homme et à une femme, c’est plus commode d'avoir affaire à un mouton ! à quelqu'un qui n’aura pas d'esprit de saine critique, qui acceptera tout ce qu'on lui dira pour argent comptant, tous les slogans à la mode, tout ce qu'on voudra lui bourrer dans le crâne. C'est pour cela qu'on ne va pas développer sa raison, lui apprendre à réfléchir, lui apprendre à raisonner, lui apprendre à avoir un esprit sainement critique, non ! Et on lui apprendra encore moins à exercer sa volonté. Aujourd'hui, être libre ça veut dire suivre toutes ses envies, tous ses caprices. Suivre ! ! Autrefois et... toujours ! être libre, ça voulait dire se diriger soi-même, ne pas accepter d'être entraîné, ou d'être mené aussi bien par ses instincts que par l'entraînement des copains, que par les slogans à la mode, faire ce que soi-même on juge bien et ne pas en démordre. Ça s'apprend cela .... ça se forge une volonté. on l'oublie !

On oublie de former le cœur. Et, là, je m'adresse en particulier aux parents. Je ne sais si vous avez déjà lu un spécimen de ces livres d'information sexuelle qui vont être mis entre les mains de vos enfants à partir de l'âge de 7-9 ans, c'est le premier tome, 10-13 ans, c'est le deuxième, 14-16, c'est le troisième et 17-18, c'est le quatrième. Lisez-les ! A notre époque, tout le monde est bien obligé de reconnaître que la technique pure quand elle est poussée jusqu'au bout, sans souci de l'humaniser, devient catastrophique, même dans l'industrie, parce qu'elle rend ce monde-là invivable pour des êtres humains. On a vu, aujourd'hui, que de développer la technique uniquement pour la technique, sans se soucier, de l'humaniser, c’était la catastrophe. Or, dans ces livres, qui traitent d'un sujet qui est et doit être humain s’il en fut jamais un, vous trouvez toutes les techniques qu'on a pu jamais imaginer de ce qu'on ose y appeler l'amour c'est-à-dire pour ces auteurs, toutes les techniques pour tirer de son propre corps et de celui des autres, le plus de plaisir possible. Tournez, feuilletez les pages de ces livres, tout cela est montré avec force photos à l'appui (oh ! il y en a des photos de nudités !) vous ne trouverez pas une phrase, un passage qui exalte ce que c’est qu'un véritable amour humain : l'adoration de quelqu'un que l'on estime par-dessus, tout parce qu'on le trouve sensationnel et qu’alors, on se donne à lui corps et âme, et cœur et esprit, tout entier : on lui consacre l'entièreté de sa vie et l’entièreté de son être, ça, on n’en parle pas !….

Qu'est-ce que ça va donner ? eh bien, hélas ! l’expérience est déjà faite, tous ceux qui ont fréquenté un peu les jeunes, les parents qui ont eu des enfants, s'aperçoivent très bien quand un enfant "tourne mal" comme on dit. Qu'est-ce qui permet de détecter ce changement dans le cœur de l'enfant ? Il devient dur, il devient égoïste, ses parents, il ne peut plus les sentir. Attention ! ... cet enfant ce qu'il recherche, c’est son plaisir égoïste uniquement, son plaisir corporel uniquement, c'est ça qui l'obsède. Mettre sa joie à se dépenser pour un autre, mettre sa joie à faire la joie d'un autre ? vous voulez rire ! Essayez de lui demander le plus petit service et vous verrez comment il vous recevra. Tout pour lui voilà. Est-ce que j’exagère ? Est-ce que c'est faux, est-ce que c'est vrai ? Je ne cherche pas en endoctriner, à chacun de juger.

Ce qui est frappant dans l’Evangile c'est cette tendresse de Jésus-Christ pour les enfants. Vous connaissez tous ce passage où le Seigneur prend un enfant, le campe au milieu de tous, le cite en exemple, le bénit. Il l’embrasse et nous déclare que nous devons l'imiter, cet enfant, si nous voulons entrer dans son royaume. Qu’est-ce qui fait que Jésus-Christ les aime tant ces petits au point, en effet, qu'en toutes circonstances il leur témoigne sa tendresse, au point qu'il les défend quand les Apôtres sont furieux de voir toute cette marmaille qui lui court après. Jésus leur dit : " laissez venir à moi ces petits, car c’est à ceux-là qu’appartient le royaume ". Ce qui prend le Seigneur, c'est que ces enfants sont en accord avec Lui, avec son idéal. Cette clarté de l'enfant ! cette logique de l'enfant ! cette franchise, cette spontanéité de l'enfant qui fait que sortent de sa bouche des vérités qui, parfois, sont des drôles de gifles pour nous ! Ce côté admiratif de l'enfant ! ces grands yeux tout ouverts : quand il y a quelque chose de beau, quelque chose qui brille, il est dans l'admiration ! Et ce sont toutes ces richesses que Jésus veut que l'on sauvegarde, toutes ces richesses qui sont des reflets de cette empreinte de Dieu qui nous a créés à son image, et cette image qui avait été ternie, Jésus l'a renouvelée, restaurée, intensifiée par la grâce du baptême.

"On va te dessaler, mon petit ! ... on va te ternir, te salir, on va te vieillir, on va faire de toi un désabusé ! "... Voilà ce que crie notre monde pourri à l'encontre de Jésus-Christ ! et encore une fois, il organisera, il orchestrera tout pour ça.

A nous de tenir tête. A nous d'offrir à ces jeunes l'antidote de ce milieu pourri dans lequel bon gré, mal gré ils seront tôt ou tard plongés.

Chez nous, dans nos catéchismes comme dans nos groupements, nous cherchons à épanouir ces jeunes dans toutes leurs dimensions. Chez nous, nous voulons leur apprendre à réfléchir ! Et je voudrais bien qu'il y ait quelqu’un qui puisse me dire dans l'assistance si jamais nous avons forcé, même un enfant, à croire ?.. On lui dira toujours toutes les objections, on lui donnera les réponses : il jugera. Mais faire faire des gestes religieux à des gens qui n'ont pas la foi, leur faire faire par conséquent des gestes sacrilèges ? ne comptez pas sur nous

Chez nous, ce que nous voulons essayer de former chez les jeunes, c’est la volonté. En faire des hommes et des femmes qui ne se laissent pas impressionner par le "qu'en dira-t-on ", par les petits copains, et qui sachent commander à leurs instincts, qui sachent les juger : cette envie que j'ai, elle est bonne, je la suis à bloc ; celle-là je juge qu'elle est mauvaise, qu'elle est néfaste, qu’elle me "sabote", qu'elle me diminue, qu’elle n'est pas conforme à mon idéal tel que le Seigneur Jésus me l'a présenté, je lutte et je me sens… quelqu'un !

Oui, nous voulons leur faire expérimenter la joie qu'il y a à se sentir une personne, quelqu'un qui est maître de soi et non pas un mouton. Nous voulons leur faire expérimenter que l'effort moral comme l'effort physique, "c'est rentable", que ça apporte une joie extraordinaire.

Nous voulons surtout leur faire expérimenter la joie que l’on éprouve quand on se sent en accord avec Dieu ; du reste ne veut-Il pas, Lui, uniquement, notre vrai bonheur, comme un Père, quoi ! C'est important tout cela !

Ce que nous cherchons à faire dans nos groupements, dans nos catéchismes, c'est de former le cœur de vos enfants. De leur apprendre le véritable amour que Jésus-Christ est venu nous révéler, qui est don total de soi aux autres, de leur apprendre que, comme dit le Christ, la noblesse la plus grande, ce qui peut donner le plus de fierté à quelqu'un c'est de servir : " celui qui voudra être grand, celui qui voudra se sentir grand, qu'il serve à quelque chose ! Qu'il serve son prochain ! " Entre parenthèses, chers amis, c’était bien la devise des scouts. Il n'y a pas de devise plus chrétienne que celle-là : " servir " ! C'était celle du Seigneur Jésus : " Je suis venu pour servir " ! Nous sommes à bonne école.

Pour vous aider dans cette éducation chrétienne solide de vos enfants, nous n'avons voulu mettre à la tête de nos groupements, ou prendre comme catéchistes que des chrétiens convaincus qui ont trouvé dans la pratique de leur foi, leur épanouissement complet, leur joie complète, au point que ce qui les pousse à se dévouer auprès de ces jeunes, c'est le désir de leur transmettre cette joie.

S'ils n'avaient pas fait cette expérience, leur éducation, leur enseignement serait de l'endoctrinement, ce serait à la limite de l'hypocrisie, et il ne faut pas le faire ! Ce que nous voulons, c’est transmettre ce que nous-mêmes nous avons expérimenté, ce qui nous-mêmes nous habite, ce qui pour nous-mêmes fait notre joie suprême, ce qui pour nous-mêmes donne un sens à notre vie, ce qui pour nous-mêmes nous a permis d’épanouir toutes nos facultés, et qui nous a rendus heureux, ce qui nous a permis de ne pas être submergés par les flots qui nous entourent parfois, mais de rester quelqu’un ? Eh bien ! au cours de cette messe prierons pour cela., chers amis : pour que tous nos jeunes soient " quelqu’un " parce qu'ils seront des "mordus" de Jésus-Christ !

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