Année A - 7ème dimanche de Pâques


Retour au menu 

 

HOMELIE

BLOTTIE DANS SON RECOIN SOMBRE, elle n'ose pas bouger, LA PAUVRE VIEILLE MAMAN…

Elle reste là, sans rien dire, des heures et des heures, des journées entières, suivant du regard de son cœur, les allées et venues de ses enfants, de ses grands enfants, qui vont et qui viennent mais qui n'ont jamais pour elle un seul mot, encore moins un sourire ! Ou plutôt, si, quand il n'y a plus d'argent (ce sont tous des paniers percés !), ils viennent alors, tantôt tout mielleux, tantôt presque avec des menaces et sur un ton !... lui dire : "Ouvre tes coffres, il n'y a plus de sous !" Pauvre maman ! Les a-t-elle pourtant soignés, entourés, gâtes, dorlotés, ses enfants ! S'en est-elle donné assez de mal pour les élever, pour leur donner une magnifique situation dans la vie... Mais, pour elle point de reconnaissance, on a bien autre chose à faire que de s'occuper d'elle ! Elle ne peut être qu'encombrante, sauf quand on a besoin de lui soutirer encore de l'argent. Vauriens ! Ingrats ! Si elle n'avait pas été là sans cesse avec toute sa tendresse, avec toute sa sollicitude, où seriez-vous aujourd'hui ?... Si elle vous avait laissés tomber quand vous lui en avez fait tant voir... Mais non ! et maintenant encore dans son coin, abandonnée, délaissée, elle ne peut s'empêcher de vous aimer et d'être préoccupée pour vous... Chère Maman ! Bonne Maman !

Vous la connaissez, mes frères, cette maman ? Vous en connaissez peut-être, hélas ! des mamans ainsi délaissées... " C'est ignoble !" dites-vous. Il en est une que vous connaissez tous... qui sait ? que vous-mêmes vous traitez peut être parfois un peu de la sorte... et cette maman... c'est Dieu ! Oui ! A plusieurs reprises dans la Bible, Dieu se compare à une Mère, à une maman (cf. livre de l'Ecclésiastique ch. 3, v. 10 ; Isaïe, ch. 66, v. 13 et ch. 49, v. 15…) Et Jésus lui-même ne nous présentera-t-il pas Dieu comme un Père qui a des attentions maternelles pour nous, s'intéressant aux moindres détails de notre vie, jusqu'au cheveu qui tombe de notre tête ou qui blanchit (Saint Matthieu, ch. 5, v. 36 ; ch. 10, v. 30).

Or, comment est-il traité, comment le traitons-nous ce Dieu plein de sollicitude et de tendresse ?... Oui ! Il est bien le parent pauvre…

Ce Dieu si bon pour nous, ce Dieu auquel nous devons absolument tout que de gens L'abandonnent, L'oublient, Le méprisent, sauf quand ils sont malheureux, quand ils ont peur ou qu'ils ont besoin de solliciter une grâce ! Oh ! alors, ils deviennent bien pieux, mais une fois obtenu ce qu'ils voulaient, passé le danger, on ne pense plus à Lui, on vit exactement comme s'il n'existait pas…

" MISSION ACCOMPLIE ! " vous venez d'entendre ce qu'a dit son Fils, ce que vient de dire Jésus-Christ ?... " Je t'ai glorifié sur la terre... J'ai manifesté ton Nom aux hommes que tu m'as confiée, j'ai achevé la tâche que tu m'avais donnée. "Ainsi, quand Jésus, au soir de sa vie, veut résumer son travail au milieu des hommes, Il ne dit pas : "j'ai guéri les malades, chassé les démons, prêcher ta doctrine", mais : "je t'ai glorifié ! j'ai manifesté aux hommes ton Nom, c'est-à-dire selon l'expression juive : ta Grandeur, ta Majesté, ta Bonté, ta Beauté ! et ainsi j'ai accompli la Mission que Tu m'avais donnée !" Toute la vie du Seigneur Jésus, en effet, n'est-elle pas "théocentrique" ? Nous avons vu, il n a pas longtemps dans l'Evangile de Saint Jean comment le leitmotiv de toute la vie de Jésus, c'est la volonté de son Père : dire les paroles de son Père, juger comme son Père agir comme Lui.

Or Jésus demande à ses disciples de poursuivre son œuvre, sa mission. "Comme le Père m’a envoyé, Moi je vous envoie. Que votre lumière, disait-Il à ses disciples, brille devant les hommes, de sorte que voyant vos bonnes œuvres, ils glorifient votre Père qui est dans les cieux." (St Matthieu, ch.5, V.16) Et encore dans Saint Jean, parlant des fruits que porteront ceux qui resteront unis à Lui, comme le sarment à la souche de vigne, Jésus disait : "Mon Père est glorifié quand vous portez beaucoup de fruits..." (Saint Jean, ch.15, v 8).

Oui, c'est entendu, c'est par nos œuvres, par nos fruits, par nos actions, que nous devons glorifier Dieu. "Ne dites pas " Seigneur, Seigneur ! " dans la prière, si ensuite vous n'obéissez pas à mes commandements !" (Saint Luc, ch. 6, v. 46).

C'est en voyant "ce que ça donne" quand on obéit à Dieu, que les hommes, les incroyants eux-mêmes, nous disait Saint Pierre, un de ces dimanches, en viendront à glorifier Dieu en reconnaissant que ceux qui le servent sont sensationnels ; c'est comme cela que nous pourrons faire honneur à Jésus-Christ...

Mais il n'empêche que pour en arriver là, vu notre psychologie humaine, nous avons besoin de penser souvent à Dieu, au Seigneur-Jésus, pour être emballés de plus en plus par Lui, pour avoir de plus en plus le souci de L'aimer, de Lui faire plaisir, de L'imiter pour Lui demander de nous aider...

Dieu, du reste, tient à ce que nous pensions à Lui de façon explicite. Il y tient parce qu'Il n'est pas un Dieu fantasque et capricieux qui, après avoir lancé sa Création, s'en désintéresseraient complètement (peu lui importe ce que nous faisons, peu lui importe que nous songions à lui ou non !) Il y tient parce qu'il est notre Père.

Déjà dans l'Ancien Testament, Dieu avait élevé son peuple comme vous, parents, vous élevez vos enfants. Pour que ce peuple vive constamment dans la joie sa dépendance existentielle vis-à-vis de son Créateur, Dieu avait voulu qu'à propos de tout et de rien, son peuple se rappelât cette dépendance en lui offrant au milieu de grandes festivités les prémices, les premiers fruits de la récolte, les premiers nés du troupeau. Ainsi ce peuple de Dieu se redisait sans cesse, à propos de tous les événements de sa vie d'agriculteurs, que tout lui venait de Dieu, que Dieu avait le droit d'être le premier servi.

Jésus serait-il donc venu pour détrôner son Père, pour diminuer les exigences de sa sollicitude et de sa tendresse paternelles ? Voyez plutôt : il reprend à son compte le premier des commandements de la loi de Moïse : "Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de toutes tes forces" (C'est vraiment du totalitarisme, mais celui-là inspiré par l'amour !). Et Jésus appuie en disant : "C'est là le premier et le plus grand des commandements." (Saint Matthieu, ch.22, v.37-40).

Hélas, combien de gens pensent à Dieu aujourd'hui ? Oui, il est bien le parent pauvre !

Qu'il le soit pour ceux qui, de plus en plus nombreux, hélas, bornent leur horizon à cette terre, pour ceux dont l'unique préoccupation est de se procurer tout le confort matériel possible, qui ne voient dans leur vie que les satisfactions matérielles qu'ils peuvent se procurer, cela se comprend aisément.

Mais qu'il le soit pour ceux-là qui font profession de croire en Lui, mieux que cela, pour ceux qui se prétendent chrétiens et disciples de Jésus-Christ, alors là, c'est effarant !

Or, c'est bien cela que nous constatons autour de nous et même peut être chez nous.

Voyez tous ces parents qui considéreraient comme une injure si on leur disait qu'ils ne sont pas croyants, qu'ils ne sont pas chrétiens, et qui attendent cependant l'âge du catéchisme pour parler de Dieu à leur enfants, pour lui apprendre à prier !...

Voyez ces parents soi-disant chrétiens qui, lorsqu'ils ont mis leur enfant au catéchisme, trouvent que tant d'années d'instruction religieuse, tant d'années pour préparer une profession de foi c'est tout de même exagéré et qui, pour un oui pour un non, leur font manquer le catéchisme. Oh ! par ailleurs, ces mêmes parents veillent avec soin à son assiduité à l'école ! Deux poids, deux mesures : Dieu, le parent pauvre...

Voyez ces parents qui ne se préoccupent nullement de savoir si l'enfant fait sa prière, qui bien moins encore songent à la faire avec lui, qui acceptent si facilement qu'il manque sa messe le dimanche, qui seront même les premiers à lui conseiller de se reposer ce jour-là au lieu d'y aller et qui, du reste, leur montrent l'exemple sur ce point...

Voyez ces parents qui trouvent inadmissible, vieux jeu, que l'on exerce un certain contrôle sur ces présences à la messe, qui même s'en indigneront comme une atteinte à la spontanéité de l'enfant ! Je demande : ces parents-là, n'ont-ils pas au souci de faire prendre de bonnes habitudes à leurs enfants quand ils étaient tout petits ? Que de fois ne les ont-ils pas repris quand ils oubliaient de leur dire merci... Mais vis-à-vis du Seigneur, pas besoin de leur donner, de bonnes habitudes, ce serait les brimer... Allez, allez, soyons sérieux s'il vous plaît . Encore une fois : deux poids, deux mesures ! Pourquoi cet illogisme ?

Voyez ces parents qui protestent quand, durant une colonie de vacances, leur enfant ne leur donne pas régulièrement signe de vie. Ont-ils le souci, eux, de donner de temps à autre signe de vie Dieu ( à Dieu qu'ils prétendent être leur Père) en faisant une petite prière...?

Quel illogisme encore chez ceux qui prônent aujourd'hui "la foi sans la messe !", qui prétendent que l'on peut être chrétien sans aller à la messe le dimanche ! Pourrait-on, s'il vous plaît, se prétendre amoureux de quelqu'un si, pour un oui, ou pour un non, on manquait ses rendez-vous ? Si on les manquait quand çà vous gêne un peu ? Mais pour Dieu... n'est-ce pas... Deux poids et deux mesures... le parent pauvre !

Et vous tous qui acceptez l'ordonnance d'un médecin qui, pour combattre votre asthénie ou votre anorexie vous prescrit absorber telle nourriture ou de faire tant de repas par jour, pourquoi en voulez-vous à l'Eglise, pourquoi trouvez-vous quelle brime votre liberté quand elle vous fixe, surtout quand vous souffrez d'anorexie spirituelle, quand votre tonus spirituel est affaibli et que vous n'en auriez pas envie, d'aller à la messe chaque dimanche ? Elle y croit, elle, à la parole du Seigneur déclarant qu'on ne peut se passer de l'Eucharistie si l'on veut vivre de sa vie. (Saint Jean, ch.6, v. 53).

Chrétiens vous-mêmes, vous qui vous dites disciples de ce Christ, est-ce bien la même religion que Lui que vous professez ? Est-ce que Dieu tient bien dans votre vie la première place ?

Par exemple, êtes-vous fidèles à lui offrir les prémices de votre journée dans un élan du cœur que nos enfants traduisaient, en colonie de vacances, par ce cri lancé au réveil : "Pour Dieu, hip ! hip ! hip ! hourrah !" ou expression plus biblique : "Vive Dieu" ou encore selon un mode plus liturgique : "Gloire à Dieu". Voilà une prière du matin, au saut du lit, qui ne prend pas beaucoup de temps mais qui, faite avec cœur, remet Dieu à sa Place, la première !

Ensuite, avez-vous l'habitude de tout rapporter à Dieu comme il se doit, comme le faisait notre modèle Jésus-Christ, comme le recommandait Saint Paul aux premiers chrétiens : "Soit que vous mangiez, soit que vous buviez, quoique vous fassiez, faites tout pour la gloire de Dieu." (Première Epître aux Corinthiens, ch. 10, v. 31). Savez-vous à l'occasion parler de Lui et de son Fils comme de Quelqu'un que vous aimez et dont vous êtes fiers ?

Surtout n'allez pas croire qu'accorder à Dieu sa place, c'est diminuer dans votre vie celle faite au prochain ! Dans la mesure, au contraire, où vous saurez reconnaître en celui-ci, comme nous l'enseigne la Bible, l'image même de Dieu, votre prochain prendra à vos yeux, aux yeux de votre cœur et de votre foi, une taille surhumaine, une taille divine ; la taille même de Dieu ! "Hôtel-Dieu" : c'était le nom des hospices dans lesquels on recueillait Dieu en la personne des mendiants et des malheureux...

N'allez pas croire, non plus, que mettre Dieu à sa place, mettre sa volonté au centre de votre vie, comme si elle était au centre de la vie de Celui que vous prétendons suivre, Jésus-Christ ne croyez pas surtout que ce soit là assombrir notre vie, diminuer notre élan vital et notre enthousiasme ! Bien au contraire, c'est les décupler, faites-en l'expérience ! Dieu qui nous a faits, encore une fois, serait fantasque et capricieux si, ensuite, il voulait autre chose que notre plein épanouissement. Saint Thomas d'Aquin, le grand théologien de l'Eglise a écrit : " Dieu n'est offensé que lorsque nous agissons contrairement à notre vrai bien." (Somme contre les Gentils III ch. 122).

En tout cas, chargés de continuer la mission même de Jésus-Christ, nous ne cesserons de faire tous nos efforts pour mettre à la base de tout notre apostolat et de toutes nos œuvres, le culte, l'amour de Dieu notre Père et de son Fils Jésus-Christ, persuadés que c'est le principe d'une vitalité et d'une joie toutes nouvelles qui ne finira pas. " La vie éternelle (qui débute ici bas et ne s'achève jamais) c'est qu'ils te connaissent Toi le seul vrai Dieu et, celui que tu as envoyé : Jésus-Christ !" C'est Lui-même qui l'a affirmé (Saint Jean ch.17, v.2 3).

Haut de la page