Année A – Sacré-Cœur de Jésus


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SOMMAIRE DE L'HOMÉLIE

Thème : Les caricatures du Coeur de Jésus... aujourd'hui on caricature sa charité... la charité chrétienne.

1) LE CHRIST EST TOUT AMOUR, TOUTE TENDRESSE, TOUT DEVOUEMENT

C'est pourquoi son emblème c'est un coeur ou une croix...

- Il embrasse les enfants...
- Il pleure sur Jérusalem et au tombeau de Lazare...
- Il ne peut dire "non" quand la souffrance crie vers Lui. Exemples...
- Il ne peut voir une souffrance sans intervenir. Exemples...
- Sa pitié et son amour s'étendent à tous sans distinction...
- Spécialement aux pécheurs..... pour eux, Il donnera sa vie...

2) CEPENDANT, sa bonté n'est pas "bonacité" : il ne pactise ni avec nos péchés, ni avec nos faiblesses.

- Il n'édulcore pas la vérité ou les exigences morales. Exemples...
- Il n'oppose jamais charité et vérité... Exemples...
- Sa Miséricorde pour les pêcheurs ne l'empêche pas de condamner le péché.
- Il ne peut supporter le pécheur orgueilleux ... exemples... ni le pécheur endurci... Exemples...
- Il ne laisse pas tout faire : les vendeurs chassés du Temple... le scandale...

3°) CONCLUSION : Une charité chrétienne, c'est une charité "à la mode de Jésus-Christ".


HOMÉLIE

 

(Je présente une image d'un Sacré-Coeur doucereux, genre "St Sulpice").

REGARDEZ, REGARDEZ BIEN... Est-ce ainsi, mes frères, que vous vous représentez Jésus-Christ ?... Est-ce bien Lui, cet homme aux yeux bleus, au visage pâle, à la barbiche blonde, à l'air langoureux, doucereux ?... Je le répète : est-ce ainsi, bien ainsi, que vous vous représentez Jésus-Christ ?...

Dieu sait si on s'est moqué de cette caricature du Seigneur ! Dieu sait si nos modernes s'en sont gaussés de toute cette imagerie que l'on appelait d'un terme dédaigneux : "genre St Sulpice" !

Or voici qu'en fait, elle devient plus contemporaine que jamais. Ce qui est plus grave, c'est que le Christ n'est plus simplement ainsi caricaturé en image, mais en réalité. Aujourd'hui on voudrait faire passer Jésus-Christ, ou tout au moins les chrétiens, donc ceux qui, par définition, doivent être des images, des copieurs du Christ, pour des gens doucereux qui, sous prétexte de charité, doivent laisser tout faire, tout dire, qui ne doivent jamais condamner quoi que ce soit, qui ne protestent jamais, qui doivent tout encaisser, même lorsqu'on déshonore leur Dieu, lorsqu'on caricature leur foi, lorsqu'on bafoue leur idéal !

J'aurai l'occasion, un de ces dimanches prochains, de dénoncer cette caricature du chrétien.

Aujourd'hui, essayons à travers les pages de l'Evangile de retrouver le vrai visage du Seigneur, essayons de découvrir le vrai coeur de Jésus.

On a l'habitude de représenter les grands personnages avec l'emblème qui les caractérise, qui exprime leur rôle dans l'histoire.

Jésus est le seul, parmi tous les personnages connus, que l'on représente avec une croix ou avec un coeur, plus exactement "par" une croix et "par" un coeur, tellement la tendresse, tellement le don de soi jusqu'au sacrifice s'identifie avec Lui. Et de fait, s'il est incontestable pour qui réfléchit deux minutes que, comme on l'a dit, personne au monde n'a jamais été aimé comme Jésus-Christ, il est aussi incontestable que personne au monde n'a jamais aimé, ne s'est jamais autant donné que Jésus-Christ. C'est vraiment "l'homme pour les autres" comme disait le pasteur Bonhoeffer...

J'ai déjà eu l'occasion de le dire : comme il est bouleversant de voir cet homme dont les forces sont tendues avec une énergie totale au service d'une grande idée, qui, avec toute la passion d'une volonté enthousiaste, supraterrestre, se jette à la poursuite d'un but vraiment surhumain, et qui pourtant prend un petit enfant dans ses bras, l'embrasse et le bénit.

J'ai déjà eu l'occasion de le dire : alors que l'homme considère ordinairement les pleurs comme une faiblesse indigne de lui, si bien qu'il se cache et qu'il a honte quand il lui arrive de verser des larmes, Jésus, Lui, le Fils de l'Homme qui était aussi le Fils de Dieu, n'a pas eu honte de pleurer publiquement à la pensée des châtiments qui allaient fondre sur sa perfide patrie. Il n'a pas eu honte de pleurer publiquement devant le tombeau de Lazare, son ami.

Je l'ai déjà dit : Il ne peut dire non quand c'est la souffrance qui crie vers Lui. Il répond à tous les appels :

A la descente de la montagne, un lépreux se présente Seigneur, "si tu le veux, tu peux me guérir !" Emu de compassion, Jésus le toucha : "Je le veux, sois guéri !" (Matthieu, ch.8, v.2-4, Marc ch.l, v.41)

C'est le centurion qui accourt : "Seigneur, descends avant que mon fils ne meure !". "J'irai et je le guérirai." répond Jésus (Jean,ch.4, v.49 - Matthieu ch.8,v.5).

C'est Jaïre, le chef de la synagogue de Capharnaüm : "Seigneur, ma fille vient de mourir, mais viens, impose-lui les mains et elle vivra. Et Jésus se levant le suivit." (Matthieu ch.9,v.18-19 - Luc ch.8,v.55)

Les deux aveugles de Jéricho : "Seigneur, aie pitié de nous !" Et Jésus : "Que voulez-vous que je vous fasse ?" - "Seigneur, que nos yeux s'ouvrent" et "pris de pitié", Jésus toucha leurs yeux. (Matthieu ch.20,v.27-34)

C'est le père de l'épileptique : "Seigneur, aie pitié de mon fils, il est épileptique, il tombe dans le feu, il tombe dans l'eau. Je l'ai amené à tes disciples mais ils n'ont pu le guérir. Toi, du moins, si tu peux quelque chose, aide-moi." Et Jésus de répondre : "Si tu crois, tout est possible, pour celui qui croit." - "Je crois, Seigneur, mais viens en aide à mon incrédulité." - "Amenez-moi l'enfant !" et Jésus le guérit. (Marc ch.9, v.22)

Ce sont les dix lépreux : "Jésus, Maître, aie pitié de nous !" - "Allez vous montrer au prêtre." dit Jésus et, chemin faisant, ils sont guéris. (Luc ch.17,v.11-19)

Il ne peut même pas voir une souffrance sans intervenir tout de suite pour la soulager :

"Se rendant au temple, il rencontre l'aveugle-né qui mendiait et il le guérit." (Jean ch.9,v.1-39)

Une autre fois, Jésus entre à Jérusalem par la porte dite "des brebis". Il longe la piscine de Bézatha toute proche. Il y a là un pauvre gars paralysé depuis 38 ans qui attend que quelqu'un veuille bien le plonger dans cette piscine réputée miraculeuse ! Jésus en a pitié : "Veux-tu être guéri ?" et le Seigneur : "Prends ton grabat et marche." et voilà l'homme sur ses pieds. ( Jean ch.5, v.1-10)

Entrant à Naîm, la petite troupe des Apôtres croise un enterrement. Jésus a pitié de cette pauvre maman qui a déjà perdu son mari et pleure derrière le cercueil de son fils unique : "Ne pleure pas ! et il rend le fils à sa mère." (Luc ch.7,v.1l ss)

Oui, Jésus a pitié, Il a pitié aussi de la foule qui a faim et, pour elle, il multipliera les pains (Marc ch.8, v.2). Il a pitié de cette foule amorphe, avachie parce qu'elle n'a pas de pasteur pour la relever, pour la réanimer ; Il lui envoie ses Apôtres comme pasteurs (Matthieu ch.9, v.36). Dans sa pitié, dans son amour, Il ne fait aucune distinction de personnes.

Il aime ses coreligionnaires mais aussi les hérétiques, les Samaritains.
Il aime ses compatriotes mais il a pitié aussi des membres de l'armée d'occupation du centurion romain.
Il aime les gens dont la profession est mal vue, les publicains. Il en choisit même un, Matthieu, comme Apôtre.
Il aime les pauvres certes, mais il aime aussi les riches : Zachée, Joseph d'Arimathie, Nicodème...
Il a pitié de tous ceux qui souffrent, mais Il a peut-être pitié encore plus des pêcheurs.

C'est de son coeur miséricordieux que sort la parabole de l'enfant prodigue ou celle de la brebis égarée. Il ne craint pas de fréquenter les pécheurs et les gens de mauvaise réputation, d'aller même manger avec eux, au grand scandale des Pharisiens et des gens bien pensants, mais c'est pour les amener à repentance : " Ce ne sont pas les bien portants qui ont besoin du médecin, mais les malades. Je ne suis pas venu appeler les justes mais les pécheurs à la repentance. " (Luc,ch.5,v.32 - Matthieu ch.9,v.10-13 et ch.11, v. 19 - Luc,ch.7,v.34). Il les aime tellement, ces pauvres pécheurs, qu'il ira jusqu'à donner sa vie pour eux au milieu des pires tourments. Il dit Lui-même qu'il est venu pour "donner sa vie en rançon pour une multitude" (Matthieu, ch.20,v.28). Saint Pierre le souligne dans son Epître : "Lui, le Juste, est mort pour les injustes (1ère épître de St Pierre,ch.3,v.18). Saint Paul en était suffoqué à peine trouverait-on quelqu'un qui veuille mourir pour un homme juste, mais le Christ, Lui, alors que nous étions encore pécheurs, est mort pour nous !" (Romains,ch.5, v.7).

Et CEPENDANT, et c'est là l'autre volet de notre diptyque, malgré cet Amour, cette condescendance pour les pécheurs, LE CHRIST NE PACTISE NULLEMENT AVEC LE PECHE, NI MEME AVEC LA FAIBLESSE OU LA LACHETE HUMAINE.

Il n'édulcore certes pas la vérité ni ses exigences morales pour les rendre plus acceptables. Devant ses auditeurs qui se récrient lors de l'annonce du mystère de l'Eucharistie, Il ne fait qu'affirmer plus fortement : "Si vous ne mangez ma chair et ne buvez mon sang, vous n'aurez pas la vie en vous." et Il laisse s'en aller ceux qui trouvent cela trop dur. (Jean, ch.6, v.52-53 et v.60-66). Il sait très bien que peu de gens prendront la voie étroite dont Il a promulgué les exigences dans son sermon sur la montagne. (Matthieu, ch.7, v.13-14). Il n'admet même pas le tempérament que Moïse, "à cause de la dureté du coeur des juifs", a cru devoir apporter l'indissolubilité du mariage. Il restaure la loi dans sa pureté originelle et condamne le divorce de façon si catégorique que les Apôtres eux-mêmes sont décontenancés et se demandent si, dans ces conditions, il ne vaut pas mieux ne pas se marier ! Jésus riposte : "Ce qui n'est pas possible humainement le devient avec la grâce de Dieu." (Matthieu,ch.19,v.1-10 - Marc, ch.10,v.27).

Jésus n'opposera jamais, comme on le fait souvent aujourd'hui, vérité et charité. La toute première charité, n'est-elle pas d'apporter la lumière, la vérité à ceux qui ne l'ont pas, la toute première des charités, n'est-elle pas d'ouvrir les yeux des aveugles ? Jésus sait que la vérité libère ! (Jean,ch.S,v.32).

Aussi, Il ne craint pas de dire à chacun son fait sans tenir compte des personnes. Ses adversaires eux-mêmes sont obligés de le reconnaître (Matthieu, ch.22,v.16).

Il accueille, certes, avec une délicatesse infinie la Samaritaine, mais il ne craint pas de choquer cette hérétique en lui disant : "Le salut vient des Juifs !" (Jean,ch.4,v.22).

Même durant sa Passion, Il dira leurs vérités à tous et à chacun. A ceux qui l'arrêtent : "Pourquoi ne m'avez-vous pas pris quand je prêchais tous les jours dans le temple ?" (Matthieu, ch.26, v.55). A Pilate qui fanfaronne sur le pouvoir discrétionnaire qu'il a sur Lui, Jésus rappelle : "Tu n'aurais aucun pouvoir sur Moi si une autorité supérieure à la tienne, l'autorité religieuse de Caïphe, ne m'avait livré à toi !" (Jean, ch.19, v.10-11). Au valet qui a voulu faire du zèle en le souffletant, Jésus riposte : "Si j'ai mal parlé, montre en quoi, et si j'ai bien parlé, pourquoi me frappes-tu ?" (Jean,ch.18, v.23).

Certes, Jésus accueille avec une miséricorde infinie le pécheur, mais Il n'en condamne pas moins le péché. Il défend la femme adultère, mais ça ne l'empêche pas de dénoncer un simple regard de convoitise comme étant déjà une infidélité (Jean,ch.8,v.1-11 - Matthieu,ch. 5, v.27).

Certes, le Seigneur accueille avec grande bonté les pécheurs, mais les pécheurs honteux et repentants. Il ne peut supporter le pécheur orgueilleux qui veut la ramener, qui veut se justifier, se faire une façade. C'est pour cela qu'Il traite de tous les noms les Pharisiens hypocrites qui "veulent paraître justes" aux yeux des hommes alors que leur intérieur est plein d'hypocrisie, d'intempérance et de vols. "Engeance de vipère, sépulcres blanchis remplis de pourriture (autant dire "fumier"), fils du diable !" et Il les maudit (Matthieu, ch. 23, v. 13-33 - Jean, ch. 8,v. 44) .

Le Seigneur se montre terrible aussi pour le pécheur endurci : "C'est le péché « éternel », le péché contre l'Esprit qui, nous dit-il, est irrémissible en ce monde et en l'autre." (Matthieu,ch.12,v.31- Marc, ch.3, v.28). Il déclare de même que celui qui n'aura pas voulu se décrasser et revêtir la robe nuptiale sera impitoyablement rejeté hors du festin ! (Matthieu, ch.22, v.11-12).

Quand Jésus nous demande de nous mettre tous à la poursuite de la brebis égarée, quand Il nous demande d'essayer de remettre sur la bonne voie celui qui s'en est écarté, c'est assurément son Coeur qui parle. Mais quand Il ajoute que si l'égaré, malgré toutes les objurgations fraternelles, malgré même les remontrances de la Communauté toute entière, ne veut pas s'amender, nous devons le traiter alors comme un païen et un publicain. Est-ce qu'Il manque de coeur à ce moment-là ? (Matthieu,ch.18,v.12-18).

Et quand Saint Paul, dans la même foulée, demande de relever avec douceur celui qui est tombé (Galates,ch.6,v.1) mais prescrit aussi : "au nom du nom du Seigneur Jésus" que l'on excommunie l'incestueux de Corinthe (lère aux Corinthiens,ch.5,v.5-6) et de ne pas frayer avec les chrétiens qui se conduisent mal (ibi.v.11) ou qui ont dévié dans la foi (lère à Timothée, ch.l,v.20 - Tite ch.3,v.10) est-ce qu'il abandonne la ligne de Jésus-Christ ?...

Pour Jésus, la charité ne consiste pas non plus à fermer les yeux et à laisser tout faire. Quand il déclare que celui qui aura été occasion de chute pour un petit mériterait qu'on lui suspende au cou une meule de moulin et qu'on le jette à la mer (Matthieu, ch.18,v.6), manquait-il à la charité, le Seigneur, ce jour-là ? Et quand Il chassait à coups de fouet les vendeurs du Temple, enflammé par le zèle du respect de la maison de son Père, croyez-vous qu'Il avait l'air doucereux ce jour-là ? (Jean, ch.2,v.13-18). N'était-Il pas plutôt enflammé d'une sainte colère comme le jour où Il était indigné par la mauvaise foi et l'endurcissement de ceux qui l'épiaient pour le prendre en défaut ? (Marc, ch.3,v.1-5).

Après tout cela, quelle audace il faut avoir pour prétendre qu'au nom de la charité chrétienne, nous devons être des "béni-oui-oui" !

Trop souvent, de nos jours, les chrétiens se laissent "piéger", trop souvent on leur a tout fait avaler sous prétexte d'une soi-disant charité ne ressemblant en rien à la charité du Christ ! De grâce, méfions-nous ! C'est "à la mode de Jésus-Christ " que nous voulons être charitables. A son exemple, nous voulons aimer tout le monde et aider tout le monde sans distinction. Nous voulons, à son exemple et selon la recommandation de Saint Paul, essayer de relever avec douceur celui qui est tombé, sachant bien que nous pouvons tomber nous-mêmes (Galates, ch.6,v.1). Mais nous n'accepterons jamais que l'on altère notre foi et notre idéal soi-disant pour le mettre à la portée des faibles. Le Christ ne l'a pas fait !

Nous n'accepterons jamais que l'on sacrifie la vérité à la charité. Le Christ ne l'a pas fait.

Comprenant d'autant mieux les faiblesses des autres que nous avons conscience de nos propres faiblesses, nous n'accepterons pas cependant de rabaisser les exigences du Christ à ce niveau...

A l'exemple du Christ, nous n'accepterons pas que ceux qui se laissent aller veuillent "la ramener" , canoniser leurs faiblesses et entraîner les autres ... Nous lutterons là contre.

Nous défendrons avec toute notre énergie, à la suite du Seigneur, l'honneur et le respect dû à Dieu et aux choses saintes...

Enfin nous essayerons d'être toujours bons mais nous ne serons jamais "poires" !

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