SOMMAIRE DE L'HOMÉLIE
1. LA BROCHE DE MAMAN...
- Sur la parole d'un ami, nous avons accepté
de faire La différence entre l'apparence et La "réalité"
- Sur la parole du Christ, notre Ami, nous acceptons
de faire la même distinction dans l'Eucharistie.
2. CELA SUPPOSE UNE FOI TOTALE AU CHRIST...
- Voilà pourquoi L'Eglise ne révélait
ce mystère qu'à la fin du catéchuménat.
- Jésus ne l'avait révélé
qu'à la fin de son ministère.
3. REACTIONS DEVANT CETTE REVELATION.
- au temps du Christ... La majorité
de ses auditeurs... les Apôtres...
- aujourd'hui... de soi-disant
chrétiens...
Nous, nous croyons que Jésus a ainsi éternisé, étendu sa présence parmi nous... (exemple de la télévision..)
4. POURQUOI CETTE INVENTION DU "GENIE DIVIN" ?
- l'Amour aspire à l'union et ne peut
supporter la séparation... exemples : la maman et son bébé...
- tout ce qu'a inventé le "génie humain"
pour supprimer les distances...
- C'est pour cela que Jésus a inventé l'Eucharistie...
- de son côté, elle suppose...
- de notre côté, elle suppose...
CONCLUSION.
HOMÉLIE
LA BROCHE DE MAMAN. Qu'elle était belle, cette broche de maman Une feuille de chêne dont les nervures étaient faites avec des diamants. Nous étions très fiers de maman lorsque, pour se faire belle, elle mettait cette broche. Mais nous n'étions pas riches et maman tomba malade. Il fallut pour la soigner faire bien des dépenses ... Nous étions devenus si pauvres qu'il fallut songer à tirer quelque argent de cette belle broche. Cela nous faisait bien mal au coeur d'autant que c'était un bijou de famille. Mais il fallait vivre et nous étions nombreux. Du moins nous voulions en tirer le plus possible et ne pas risquer de nous faire rouler.
Fort heureusement nous avions parmi nos meilleurs amis un bijoutier. On lui confia la broche pour qu'il en fasse l'expertise, l'estimation. Quelques jours après, papa revenait chez cet ami. Hélas ! à l'expertise, il était apparu que les diamants n'étaient pas vrais ! C'était très bien imité, si bien que tout le monde s'y trompait. On aurait dit vraiment des diamants mais " en réalité " ce n'était pas des diamants mais de simples cristaux merveilleusement taillées.
Vous voyez d'ici notre déconvenue. Pourtant nous ne pouvions douter ni de la compétence ni de la loyauté, ni de l'amitié de l'expert. Malgré notre déception, nous l'avons cru sur parole parce que c'était un ami et que nous avions en lui totale confiance. On ne put retirer du bijou la somme espérée...
Retenons cela : on aurait dit des diamants, ça ressemblait étrangement à des diamants, "en réalité" ce n'en était pas ; "en réalité" c'était autre chose, des cristaux bien taillés. Nous en étions sûrs parce que ce bijoutier nous l'avait dit et que c'était un ami...
Vous voyez tout de suite où je veux en venir. Le pain, l'hostie consacrée, le vin consacré, ON DIRAIT ABSOLUMENT DU PAIN ET DU VIN. Nous, chrétiens, nous savons, qu' "EN REALITE" ce n'en est pas ! "EN REALITE" C'EST LE CORPS ET LE SANG DU CHRIST. NOUS EN SOMMES SURS PARCE QUE JESUS NOUS L'A DIT explicitement et qu'Il est pour nous un Ami, un Ami dont nous saurions mettre en doute la parole.
Tout ce qui brille n'est pas or dit-on couramment, et... c'est bien vrai.
NOUS SOMMES BIEN HABITUES, DANS LA VIE COURANTE, A DISTINGUER LES APPARENCES DE LA REALITE. Que d'apparences trompeuses, que de réalités se cachent sous des apparences d'emprunt ! La même "réalité" du reste, l'eau par exemple, peut revêtir des apparences totalement différentes (dans le cas de l'eau, celles de liquide, de glace, de neige ou de vapeur et avoir des propriétés bien différentes suivant chacune de ces apparences ainsi l'eau sous l'apparence (ou à l'état) de glace ne pourra faire ce qu'elle fait sous l'apparence (ou à l'état) de vapeur...
Dans l'Eucharistie, pour qui a la foi, pour qui a une confiance absolue en Jésus, la même distinction s'impose. Mais voilà ! Il faut la foi ! C'est le "Mystère de la foi !" comme le proclame le prêtre après chaque consécration. C'est vraiment l'acte suprême de foi et de confiance au Christ Jésus. Cela suppose qu'on le croit " les yeux fermés ". Voilà pourquoi autrefois on ne révélait ce mystère de l'Eucharistie aux catéchumènes, aux candidats qui se présentaient pour le baptême, qu'à la fin de leur initiation, quand ils étaient bien convaincus de la divinité de Jésus-Christ. C'est ce que l'on appelait la discipline de l'Arcane ou "du secret". Jésus lui-même dans l'Evangile n'avait parlé de ce mystère, n'avait annoncé ce sacrement qu'à la fin de son ministère, après que ses disciples aient pu voir ses miracles pour se convaincre de sa divinité et notamment ce miracle sensationnel de la multiplication des pains.
A cette foule qui avait été enthousiasmée par ce miracle et qui voulait le faire roi, à cette foule qui L'avait suivi et poursuivi jusque de l'autre côté du lac, Jésus va révéler ce mystère, ce sacrement, ce don suprême de son amour...
C'est l'Evangile d'aujourd'hui.
Mais aussitôt on se récrie COMMENT CELUI-CI PEUT-IL NOUS DONNER SA CHAIR A MANGER ? "
C'est la raison humaine qui veut juger de la puissance de Dieu, qui veut la limiter à ce à quoi elle est habituée, à ce qu'elle peut comprendre. Mais Jésus ne fait que répéter, ne fait qu'affirmer plus fort ! "En vérité, en vérité, je vous le dis, si vous ne mangez pas la chair du Fils de l'homme et si vous ne buvez pas son sang, vous n'aurez pas la vie en vous ... Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle... Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en Moi et Moi je demeure en lui... Comme je vis par le Père, de même celui qui Me mangera vivra par Moi !" (St Jean, ch.6,v.52,53, 56,57).
C'en est trop et la plupart de ses distillés ne peuvent Le croire jusque là. " Ce langage est trop fort, disent-ils, qui peut l'écouter ? " (v. 60). Dès lors, ajoute Saint Jean, " nombre de ses disciples se retirèrent et cessèrent de l'accompagner ". (v. 66). Là encore, devant cette défection quasi-générale, Jésus n'atténue en rien ses affirmations. Il se tourne seulement vers les Douze et leur dit : " Voulez-vous partir vous aussi ? "(v. 67) et c'est alors que Simon-Pierre fit cette riposte pleine d'amour et pleine de foi : "Seigneur ! Te quitter Toi ?... Mais alors à qui irions-nous, Tu as les paroles de la vie éternelle !" (v.68).
Combien de soi-disant chrétiens aujourd'hui refusent au Christ cet acte suprême de confiance et d'amour et de foi ? Combien qui ne peuvent croire que Jésus les a aimés jusque là ? Combien qui ne peuvent croire que sa puissance peut aller jusque là ? Et l'on ne voit plus dans l'Eucharistie qu'un vulgaire morceau de pain, simple signe de partage fraternel, simple symbole ! Comme nous voilà loin des affirmations du Seigneur Jésus ! Comme nous voilà loin des affirmations de son Apôtre que nous avons entendues tout à l'heure : "Le pain que nous rompons n'est-il pas communion au Corps du Christ ? La coupe d'action de grâces que nous bénissons n'est-elle pas communion au Sang du Christ ? Et, un peu plus loin, dans cette même Epître aux Corinthiens, au chapitre onzième, Saint Paul dira : "Quiconque mange de ce pain ou boit à la coupe du Seigneur indignement aura à répondre du Corps et du Sang du Seigneur". Et il demande que chacun s'examine avant de manger de ce pain et de boire à cette coupe car, dit-il, celui qui mange et boit, mange et boit sa propre condamnation s'il n'y discerne pas le Corps du Seigneur." (ch. 11, v.27-29). Quoi de plus clair !
Pour nous, avec tous les vrais disciples de Jésus-Christ, avec toute la Tradition chrétienne, nous croyons que Jésus, que le Fils de Dieu ne nous a pas laissé comme souvenir un simple et vulgaire morceau de pain, mais bel et bien sa présence, sa présence continuée, multipliée, étendue à tous les lieux où se trouve une hostie consacrée.
Oui, nous croyons que si nos savants d'aujourd'hui ont pu réussir, grâce à l'invention de la télévision, à rendre présent partout où il y a un poste récepteur l'image et la voix d'une personne (ce qui, entre parenthèses, aurait paru impensable il y a moins d'un siècle), le Fils de Dieu, tout-puissant, a trouvé le moyen, Lui, grâce à la sainte hostie, de se rendre présent tel qu'il est maintenant au ciel (avec son corps glorifié, son âme, son esprit, sa divinité) partout où il y a une hostie consacrée.
Oui, nous croyons que, si déjà au naturel il y a plusieurs façons d'être présent quelque part (par exemple mon moi, (mon âme, si vous préférez), n'est pas présent à mon corps de la même façon que mon corps est présent dans ce lieu. Et pourtant mon moi (mon âme) se trouve bien réellement présent dans mon corps), le Christ a bien pu trouver une façon toute nouvelle pour son corps ressuscite et glorieux d'être réellement présent aux apparences du pain et du vin et de rester ainsi réellement au milieu de nous.
AH ! PETIT GREDIN, JE TE CROQUERAIS BIEN dit la maman en serrant dans ses bras son enfant et en le dévorant de baisers, tant elle voudrait, dans l'excès de sa tendresse, pouvoir le remettre en elle pour ne faire qu'un avec lui. Car c'est là le désir, le besoin de tout amour : s'unir le plus intimement possible à l'être aimé, ne faire qu'un avec lui, pour ne jamais risquer d'en être séparé.
Que n'a pas inventé le génie humain pour répondre à ce voeu, même par delà les distances : c'est l'humble bout de papier, la lettre tant attendue qui nous apportera, nous rendra présentes pour ainsi dire, la pensée et l'affection de l'ami lointain, c'est le téléphone qui nous apporte sa voix ; et à quand le téléphone-télévision qui nous permettra de voir notre interlocuteur, notre ami, tel qu'il est en ce moment même ?
Cette hantise que Dieu a inscrite dans nos coeurs, cette tendresse délirante que Dieu a gravé au plus profond du coeur des mamans, Dieu l'a puisée, si je puis ainsi parler, dans son propre coeur. Et c'est pour réaliser ce même voeu de non-séparation et d'union profonde que le Génie Divin, en Jésus-Christ, a inventé l'Eucharistie.
L'Eucharistie, la Communion, du côté du Christ, elle signifie et réalise le don total de Lui-même aux hommes, pour rester avec eux, pour leur être uni de la façon la plus intime que l'on puisse imaginer, celle de la nourriture, afin de pouvoir vivre et oeuvrer avec nous. " Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en Moi et Moi, je demeure en lui ; celui qui me mange vivra par Moi ! "
Du côté de l'homme qui communie, elle suppose le désir de s 'unir ainsi intimement au Christ. Elle veut dire : je veux m'accrocher à Lui, je veux faire ma vie avec Lui. " Fais Seigneur que je ne sois jamais séparé de toi " disons-nous dans la prière préparatoire à la communion. S'approcher de ce sacrement sans avoir ce désir profond de s'accrocher au Christ, de s'unir à Lui, et ce, d'une façon durable, ce serait fausser le sacrement, faire un geste mensonger, ce serait faire un sacrilège, ce serait un baiser de Judas !
Communier, en effet, c'est, en quelque sorte, embrasser Jésus-Christ. Voilà pourquoi Saint Paul lui-même nous exhorte à nous examiner avant de nous approcher de ce sacrement car, dit-il, celui qui communie indignement aura à répondre du Corps et du Sang du Christ. De son côté, le Saint Pape Pie X, le Pape de la communion précoce et fréquenté, écrivait dans son encyclique sur Saint Charles Borromée : " A notre époque où la foi chancelle et où la charité s'alanguit, il est particulièrement nécessaire de rappeler aux fidèles combien il serait pernicieux et dangereux de communier indignement, afin que la fréquence des communions ne diminue pas le respect dû à un si grand mystère." Combien cette recommandation faite au début de ce siècle par ce saint pape est-elle encore plus valable aujourd'hui où l'on a tellement tendance à désacraliser ce sacrement de l'Amour du Christ !
Pour nous, chers frères, oh ! profitons de cette fête pour raviver notre foi et notre souverain respect envers un si grand sacrement !
Qu'à la tendresse de Dieu qu'Il nous exprime, réponde la tendresse de notre coeur à son égard, qu'à cette folie divine, réponde un amour fou pour le Seigneur qui nous fera vivre pour Lui et avec Lui !
N'allons pas à la Sainte Table, j'allais dire "les mains dans les poches", comme on va prendre son petit déjeuner, mais avec un cur qui s'est préparé, "habillé" si je puis dire, pour cette divine rencontre, avec un cur bouleversé par cette condescendance inimaginable de notre Dieu