Année B – 15ème dimanche ordinaire


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SOMMAIRE DE L'HOMELIE

 

Jésus ne doute de rien... à sa suite Il envoie Douze hommes " sans instruction ni culture " pour expulser du monde le Mal sous toutes ses formes...

Proportion entre le but poursuivi (même s'il les envoie d'abord vers leurs coreligionnaires) et les moyens employés...

- Il les envoie deux par deux...
- Complètement dépouillés de tout...

 

Résultats...

 

Et alors, quand ils vont se lancer dans le monde païen...

Difficultés...

 

Les résultats...

- Témoignage de Saint Justin ... sur la transformation de la société...

- Témoignage de Tertullien sur l'invasion du christianisme, malgré tous les obstacles...

 

Nous aussi, disciples du Christ, Il nous envoie dans le monde d'aujourd'hui...

 

Difficultés pour rechristianiser un monde qui se déchristianise...

 

Mais aussi, comme au temps de la décadence romaine, cette matérialisation de notre monde suscite dans bien des âmes une soif " d'autre chose "… Correspondance entre cette soif et un Evangile authentique...

 

- Besoin de logique ... d'un sens à la vie... d'un dépassement du temporel et du matériel...

- Aspirations contemporaines de justice, d'égalité, de fraternité...

- L'idéal de l'amour chrétien ... son impact dans beaucoup de cœurs jeunes...

 

Poursuivons cette offensive contre le mal ... comme le Christ nous le demande... particulièrement pendant les vacances, temps favorable

 

Ne nous laissons pas impressionner par :

- notre petit nombre face à cette masse...

- notre manque de culture ... parfaire nos connaissances religieuses… ne pas majorer la difficulté..

 

Nous appuyer sur L'aide que Jésus a promise...

 


HOMELIE

 

VRAIMENT IL NE DOUTE DE RIEN, LE SEIGNEUR ... !

 

Il est vrai qu'il avait fait lui-même la trouée. Mais ensuite, quelle audace ! Il envoie son petit bataillon à l'assaut ; c'est même la première sortie de ce bataillon. Et savez-vous de combien d'hommes il se compose ? Douze exactement ! Et encore de quels hommes 1 Il faut voir ... Ce n'était certes pas des gens très calés. Saint Luc lui-même, dans les Actes des Apôtres (ch.4, v.13) nous dit que les membres du sanhédrin étaient étonnés de les voir parler comme ils parlaient parce que " c'était des gens sans instruction ni culture !

 

Et de fait, parmi eux, six n'étaient que des pêcheurs-paysans de Galilée.

 

Mathieu lui-même, le publicain, le percepteur d'impôts, avait sans doute plus de culture, peut-être bien quelque argent, mais n'était pas d'un niveau beaucoup plus élevé...Encore, parmi ces Douze, il y aura un traître ! et le chef de la bande lui-même reniera le Seigneur !

 

Et quel est l'ennemi auquel ils vont s'attaquer, contre lequel ils font leur première sortie ?

 

Rien moins que le Mal, le Mal lui-même sous toutes ses formes : le mal physique, la maladie et la mort elle-même : " Allez, guérissez les malades, ressuscitez les morts, purifiez les lépreux " leur dit le Christ dans le passage parallèle de St Matthieu (ch.10,v.6 et 8), mais aussi (et surtout) le mal moral : " Il leur donna autorité sur les esprits mauvais !"

 

Le mal sous ce double aspect, Dieu sait quelle était son envergure dans ce monde où le Christ les envoyait et qui était tout entier sous son emprise.

 

Douze pour attaquer ce colosse !

 

Il est vrai que Jésus va les envoyer d'abord " vers les brebis perdues de la maison d'Israël, à leurs coreligionnaires par conséquent, avant que de les envoyer dans le " monde entier " comme il le dira après sa résurrection en ce même Saint Matthieu (ch.28,v.19). On pourrait penser peut-être que c'était pour les entraîner en leur demandant d'attaquer d'abord un ennemi moins redoutable que le paganisme, en allant d'abord vers des gens qui partageaient quelque chose de leur foi. Mais est-il bien sûr que cet ennemi-là était moins redoutable ? " Les conflits familiaux font les nœuds de vipères ! " écrit Daniel Rops (Jésus en son temps, p.415). Or, si le christianisme pouvait se présenter comme étant dans la ligne de la religion mosaïque et de la religion juive, on ne peut contester qu'il se présentait comme le couronnement, l'achèvement de celle-ci, et c'était déjà difficile à admettre pour des juifs pour lesquels il ne pouvait rien y avoir au dessus de la Loi, de la Torah ! Surtout le christianisme exigeait l'intériorisation de la religion, et là alors il heurtait de plein fouet même les "purs" parmi les juifs. Les Pharisiens, la plupart du temps, faisaient consister leur perfection dans l'observance scrupuleuse des rites ou des coutumes, des pratiques. Une religion qui exerce une influence sur la vie, sur la vie toute entière, la vie familiale, la vie professionnelle, la vie sociale, Dieu sait si c'est difficile à accepter même de nos jours ! Pensez au remue-ménage que cela suscite encore aujourd'hui lorsque l'Eglise touche à la vie des affaires ou aux questions de l'amour pour y faire pénétrer l'esprit de l'Evangile ! Combien estiment qu'elle outrepasse son rôle ...! Alors, du temps du Christ, bousculer le formalisme religieux dont se contentait la presque totalité des gens, c'était s'attaquer à rude partie... ! Et encore, faire accepter à ces "purs", à ces patriotes, un messianisme qui ne soit pas politique, alors qu'ils étaient convaincus qu'Israël ne pourrait remplir son rôle, justement, que lorsqu'il aurait retrouvé son indépendance et, disons-le même, son hégémonie politique...! Là aussi, rude morceau ! Ne parlons pas encore de la difficulté à faire admettre à ces hérauts de l'Unicité et de la Transcendance du vrai Dieu que le Christ était non seulement le Messie, le Fils de l'Homme, mais aussi qu'il était naturellement le vrai Fils de Dieu...!

 

Il n'empêche ! Les Apôtres sont partis ! Partis deux à deux. Cet embryon d'équipe, cet embryon de communauté, vu notre psychologie humaine, il est indispensable pour pouvoir se soutenir mutuellement dans une tâche, dans une mission aussi ardue et qui avait vraiment de quoi intimider, de quoi faire peur. Jésus le savait bien : aussi les envoie-t-il deux par deux... Ils sont partis complètement dépouillés. Leur ennemi, ils doivent l'aborder à main plate ! Leur apostolat doit être complètement désintéressé.

 

Il est frappant de voir comment, dans l'Evangile, Jésus fait de la pauvreté, du dépouillement total, la condition primordiale pour être Apôtre, pour être prédicateur de son Evangile. L'épisode du jeune homme riche le suggère. La réponse de Jésus à Pierre qui l'interroge sur la récompense que lui vaudra l'abandon de tout ce qu'il avait, le dit expressément : " Celui qui aura renoncé non seulement à toute attache affective mais aussi à ses possessions pour lui, Jésus, et pour l'Evangile, recevra le centuple." (St Marc, ch.10, v.28-30).

 

Quel a été le résultat de cette première "sortie" des Apôtres ? Un résultat très positif, semble-t-il. Saint Marc nous dit, en effet : "Les Apôtres se réunirent auprès de Jésus et ils lui rapportèrent tout ce qu'ils avaient fait et tout ce qu'ils avaient enseigné. Alors il leur dit : venez vous-mêmes à l'écart dans un lieu désert et reposez-vous un peu (St Marc, ch.6, v.30-31).

 

Et lorsque le Seigneur augmentera l'effectif de son "bataillon" en adjoignant aux Douze soixante douze collaborateurs auxquels il donnera des consignes similaires, ceux-ci reviendront pleins de joie en disant : " Seigneur ! Même les démons nous sont soumis en ton Nom ! " et Jésus leur répondra : " Oui, je voyais Satan tomber du ciel comme un éclair et il exultera dans l'Esprit Saint (cf. St Luc, ch.10, v.17-23).

 

Qu'en sera-t-il plus tard quand les ApÔtres et leurs aides s'attaqueront au monde païen, selon la consigne que Jésus leur donne en St Matthieu (ch.28, v.19-20) et en St Marc (ch.16, v.15) avant de les quitter... ?

 

Comme le dira Saint Paul (1ère aux Corinthiens, ch.l, v.22-23), si le Christ crucifié était " un scandale pour les juifs, c'était une folie pour les païens Pour ces gens pour lesquels les dieux étaient indifférents au sort des humains, il était inadmissible qu'un dieu se soit laissé crucifier pour les hommes. Com-me était inadmissible - les chrétiens, s'ils ne le savaient, l'apprendront à leurs dépens - comme il était inadmissible que l'on refuse de rendre un culte à l'empereur...et que dire de la morale chrétienne qui, tant au point de vue social que familial, était à l'antipode de la décadence des mœurs à cette époque ... Il suffit pour s'en rendre compte de lire les Epîtres, notamment la description de cette décadence que St Paul fait au chapitre 1 de l'épître qu'il adresse aux Romains, ou dans ses autres épîtres, description dont les destinataires pouvaient vérifier l'exactitude puisqu'il s'agissait de leur ville ou même de la vie qu'eux-mêmes avaient menée avant leur conversion.

 

Or, quel a été le résultat de cette prédication qui, dès le départ, a soulevé @opposition de tous les gens en place et au pouvoir ? Je n'en donnerai que deux témoignages.

 

D'abord celui du philosophe converti Saint Justin.. Voici ce qu'il écrivait vers l'an 150 dans la Première Apologie du christianisme qu'il adressait à l'empereur Antonin : " Autrefois nous prenions plaisir à la débauche, aujourd'hui la chasteté fait toutes nos délices. Nous pratiquions la magie, aujourd'hui nous nous sommes consacrés au Dieu bon et non engendré. Nous étions avides d'argent et de domaines, aujourd'hui nous mettons en commun ce que nous possédons, nous partageons avec quiconque est dans le besoin. Les haines, les meurtres nous opposaient les uns aux autres, la différence des mœurs ne nous permettait pas de recevoir l'étranger à notre foyer, aujourd'hui, après l'apparition du Christ, nous vivons ensemble, nous prions pour nos ennemis, nous cherchons à gagner nos injustes persécuteurs, afin que ceux qui auront vécu conformément à la sublime- doctrine du Christ puissent espérer les mêmes récompenses de Dieu, le MaÎtre du monde." (1ère Apologie, XIV,2-13).

 

Et voici l'autre texte, celui-là écrit par Tertullien vers 197, qui souligne la rapidité avec laquelle le Christianisme s'est répandu malgré tous les obstacles : " Nous sommes d'hier et déjà nous avons rempli la terre, tout ce qui est à vous, les villes et leurs quartiers, les postes fortifiés, les municipes, les bourgades, les camps eux-mêmes, les tribus, les décuries, le palais, le sénat, le forum. Nous ne vous avons laissé que les temples. Nous pouvons dénombrer vos armées, les chrétiens d'une seule province sont plus nombreux. Nous aurions pu même sans armes, sans révolte, simplement en nous séparant de vous, vous combattre. Car, si formant une si grande multitude d'hommes, nous avions rompu avec vous pour aller nous établir dans quelque coin retiré de la terre, la perte de tant de citoyens, quels qu'ils fussent, eut assurément couvert de honte les dominateurs du monde ; bien plus, cet abandon eut suffi, à lui seul, à les punir." (Apologétique, XXXVII,4-6).

 

Même en faisant la part du style oratoire de ces défenses, le fait qu'elles étaient adressées soit à l'empereur, dans le cas de St Justin, soit aux gouverneurs de province, dans le cas de Tertullien, nous est une garantie de l'exactitude des faits auxquels ils font allusion, sans quoi quelle portée auraient-elles eues auprès de ces adversaires

 

Aujourd'hui, le Christ nous charge, nous aussi, de poursuivre contre le mal sous toutes ses formes cette offensive qu'il a déclenchée lui-même.

 

" Allez, nous dit-il, vous mes disciples, vous mes chrétiens, allez vers toutes les détresses, nourrissez ceux qui ont faim, donnez à boire à ceux qui ont soif, accueillez fraternellement les étrangers, vêtez ceux qui sont nus, visitez les malades et les prisonniers, luttez pour les opprimés, les exploités, pour ceux qui sont méprisés, maltraités... (cf. St Matthieu, ch.25,v.31-46)

 

" Allez tout partout dans le monde apporter la lumière de mon Evangile et le feu de mon amour... "

 

" Allez... ! Là où il y a le doute et l'erreur, apportez la vérité. Là où il y a l'hypocrisie, le mensonge, la tricherie, apportez la franchise. Là où il y a la haine, la dispute, la guerre, l'égoïsme, apportez ma charité, la bonne entente, le souci de faire plaisir..."

 

" Quand vous rencontrerez la peur, la mollesse, le laisser-aller, donnez l'exemple du cran et de l'énergie..."

 

Quand vous rencontrez l'impureté, les plaisanteries grossières, quand vous verrez la jeune fille moquée et l'amour profané, réagissez par votre pureté, votre clarté, votre respect de toutes les merveilles de Dieu..."

 

" Quand vous rencontrerez des gens qui m'insultent, qui ne m'aiment pas, qui ne peuvent me sentir ou qui tout simplement m'oublient, aimez-moi à leur place..."

 

Certes, nous aussi, nous nous attaquons à un rude morceau... !

 

Il n'est pas nécessaire de souligner ici à quel point notre monde se déchristianise de plus en plus...jusque dans les lois et les coutumes de nos sociétés modernes ...

 

Mais ce que je veux souligner, c'est ce que nous risquons de ne pas voir. C'est que la constatation de l'abîme auquel nous conduit cette vie sans Dieu, cette vie complètement matérialisée, suscite, comme la décadence romaine aux premiers siècles du -christianisme, le dégotât de nombre d'âmes qui aspirent à autre chose.

 

Le phénomène "hippie", le succès des sectes même très exigeantes, l'affluence de jeunes retraitants dans les monastères, la popularité - si je puis m'exprimer ainsi - de Jésus actuellement, ne sont-ce pas là autant de signes d'un besoin de transcender le matériel, d'un besoin de spirituel et même d'une certaine mystique...?

 

Aujourd'hui, qui n'aspire à plus de justice, à plus d'égalité, à plus de fraternité entre les hommes ? Et n'est-ce pas là ce que nous prêchons ?

 

L'idéal de l'amour humain tel que le prône le christianisme emballe bien des cœurs nobles et généreux dégoûtés par la débauche et la pourriture actuelle : j'en suis le témoin émerveillé au cours des préparations des fiancés au mariage...

 

Il n'est pas, j'ai déjà eu l'occasion de le dire, jusqu'à la science moderne qui ne vienne apporter des confirmations fort appréciables à notre foi chrétienne...

 

Profitons de cette période de vacances durant laquelle les gens peuvent retrouver une vie plus humaine et réfléchir (combien à cette occasion, reprennent la pratique !), profitons de toutes nos rencontres pour échanger et discuter fraternellement avec eux.

 

N'essayons pas de nous dérober à notre mission en arguant de l'immensité de la tâche et de notre nombre bien restreint... Les Apôtres étaient Douze...

 

N'arguons pas davantage pour ce faire de notre manque de culture, notamment de culture religieuse ... Ne majorons pas la difficulté. Les Apôtres, eux aussi, étaient " sans instruction ni culture " ... Profitons du reste un peu de nos loisirs de vacances pour approfondir les bases de notre foi... (A ce propos, j'essaierai de sortir d'ici octobre un petit fascicule qui puisse vous aider).

 

Surtout, surtout, appuyons-nous sur l'aide et la grâce que le Christ nous a promises...:." Allez, de tous les gens faites des disciples...Je suis avec vous tous les jours jusqu'à la consommation des siècles (St Matthieu, ch.28, v.19-20).

 

 

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