Année C– 20ème dimanche ordinaire


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SOMMAIRE DE L'HOMELIE

"Le Divin Pyromane"

Ce passage de l'Evangile doit bien gêner  :

- les partisans d'un christianisme froid...
- les partisans d'un "pacifisme" à tous crins...

Ce feu, Jésus l'apporte d'abord par son idéal (sa religion) susceptible, plus qu'aucun autre, de susciter l'enthousiasme.

- Aucune religion :

- n'a de dieu si proche de nous (Dieu-Père - Dieu fait homme)
- n'a de dieu plus amoureux de l'homme (la croix la messe - la communion).

- Aucune religion, aucun système philosophique

- ne donne une idée plus grandiose de la dignité humaine (homme = image de Dieu - fils de Dieu)
- ne propose à notre vie un BUT comparable : partager éternellement le bonheur de Dieu ! sans pour autant nous désintéresser du séjour terrestre, bien au contraire.

Rien ne peut stimuler davantage notre souci d'améliorer ce séjour que :

- l'exemple du Christ
- savoir que ce bonheur éternel en dépend...
- savoir que ce que nous faisons pour autrui atteint le Christ en plein coeur...

Aucun rêve de communauté ou de fraternité n'égale le notre (vivre à l'image de la Trinité !)

Aucun idéal ne peut être plus élevé  : imiter Dieu...
A son exemple, dépasser la mesure de justice = donner plus qu'on ne mérite = être miséricordieux ! Notre souci de vérité et de franchise....

Aucun idéal d'amour humain ne peut mieux correspondre aux aspirations profondes du cœur humain...

Jésus apporte ce feu à la terre surtout par sa Passion si longue (33 ans) et si, redoutée, parce que :

- elle nous incite à poursuivre à sa suite, avec élan et acharnement, sa lutte contre le mal.
- elle suscite en nos cœurs un amour passionné pour Lui...

Le rôle du chrétien dans te monde : entretenir l'idéal, la foi, l'enthousiasme.

Notre rôle à nous, prêtres : faire de vous des "incendiaires". Pour cela :

- présenter le message sans compromission, à l'exemple de Jérémie,
- le présenter avec chaleur et enthousiasme !

 


HOMELIE

LE DIVIN PYROMANE!...

Nous étions avertis. Jean-Baptiste l'avait déjà annoncé, j'ai eu l'occasion de vous le dire (cf. Année C, Homélie pour le 3ème dimanche de l'Avent) : " Celui qui va venir après moi, celui que j'ai la charge de vous annoncer, il vous baptisera, lui, dans le feu et l'Esprit Saint."

Quant à Jésus Lui-même, Il ne s'en cache pas, Il veut mettre le feu ; c'est même pour cela, nous dit-Il, qu'Il est venu sur cette terre, tout exprès pour cela !

Ah ! ah ! une fois de plus, les voilà bien ennuyés tous ces partisans d'un christianisme froid, tous ces ennemis de la chaleur et de l'enthousiasme et de tout ce qui est de nature à le provoquer... Mes pauvres amis ! je le regrette bien, mais Jésus n'est pas d'accord avec vous ... Vous vous opposez même à Lui, vous allez contre sa volonté, son attente, son désir : " Je suis venu mettre le feu à la terre et comme je voudrais qu'il soit déjà allumé !"

Et ces pacifistes à tous crins qui voudraient que l'on soit toujours d'accord avec tout le monde, qui voudraient que l'on ne heurte jamais personne, ne sont pas en meilleure posture devant le texte évangélique de ce jour : " Ne croyez pas que je suis venu apporter la paix sur la terre, non, je vous le dis, mais bien plutôt la lutte, l'opposition, l'opposition jusqu'au sein des familles ".

Cette flamme, ce feu, Jésus nous l'apporte d'abord par sa doctrine, son idéal, sa religion.

Une doctrine, un programme, un idéal qui ne peut pas ne pas "empaumer", enflammer les cœurs jeunes et généreux et même toutes les bonnes volontés.

Aucun idéal au monde n'a jamais égalé, n'égalera jamais le nôtre, comme aucun chef religieux ou politique n'égalera jamais, même d'immensément loin, le nôtre, le Christ Jésus, Notre Seigneur ! Aucune religion, comme le dit le texte sacré (cf. Deutéronome, ch.4,v.7) n'a jamais eu, n'aura jamais des dieux qui s'approchent autant des hommes comme notre Dieu. Lui l'Eternel Infini, par révélation de Jésus-Christ, nous croyons qu'Il est pour nous un vrai Père, qu'Il nous a aimés au point de nous donner son Fils, son Unique ! Une mère n'accepterait jamais de sacrifier son fils. Dieu, Lui, a accepté de sacrifier son Fils, objet de sa tendresse infinie, pour nous sauver alors que nous étions ses ennemis !

Ce Dieu, Il s'est approché de nous en la personne de son Fils, au point qu'Il est devenu vraiment l'un de nous, qu'Il a connu nos joies, mais aussi nos peines et aussi nos souffrances et même notre mort ; Il l'a même connue dans les tourments les plus atroces.

Quel dieu a jamais témoigné un amour pour les hommes comparable à celui que le Christ, le propre Fils de Dieu, nous a témoigné en mourant pour nous n'y a pas de plus grand amour - Il l'a dit Lui-même - que de donner sa vie pour ses amis  !" Cette marque suprême d'amour, non seulement du reste Il l'a donnée une fois pour toutes sur la croix, mais Il nous la redonne en nous rappelant sans cesse cette folie d'amour et en la renouvelant chaque fois que l'on célèbre une Messe!... Mieux encore, plus encore, le souhait de la maman qui, folle de tendresse pour son bébé, voudrait le "croquer" tant elle voudrait le remettre en elle, ne faire qu'un avec lui, ce souhait, notre Christ, notre Dieu, l'a réalisé à notre égard par la sainte Eucharistie, par la sainte Communion : " Ceci est mon corps, ceci est mon sang ! Qui mange ma chair et boit mon sang demeure en Moi et Moi en lui ".

Quelle religion, quel système philosophique peut nous donner une idée plus grandiose de la dignité humaine que celle que nous donne notre religion qui nous fait voir dans notre prochain la propre image de Dieu, façonnée par Dieu Lui-même ; qui nous fait voir dans nos frères chrétiens des enfants de Dieu ? Quel titre de noblesse peut être comparable à celui-là ? ...

Quelle philosophie, quelle religion, quel système économique propose à notre vie un but comparable à celui que nous propose le Christ ? Les plus osés de ces systèmes proposent un paradis sur terre dans un avenir incertain que nous ne verrons en tout cas jamais nous-mêmes et qui ne pourra durer pour chacun tout au plus que l'espace d'une vie, d'une vie terrestre, alors que le Christ nous propose comme but le partage du bonheur même de Dieu et ce, pour l'éternité  !

Et cependant cette perspective inouïe ne nous incite pas pour autant à nous évader de cette terre, à nous désintéresser du sort terrestre des hommes. Bien au contraire.

Qu'est-ce qui peut nous stimuler davantage, agir pour améliorer le séjour des hommes sur terre, que l'exemple de ce qu'a fait le Christ Lui-même et la relation qu'Il a établie entre ce que nous aurons fait ou n'aurons pas fait pour soulager nos frères ici-bas, et notre bonheur ou notre malheur éternels ? (cf. St Matthieu, ch.25,v.31-46).

Quel système philosophique ou social, quelle religion peut pousser ses adeptes à se dévouer pour les autres comme le fait notre religion chrétienne quand elle nous apprend que tout ce que nous pouvons faire en bien ou en mal à notre prochain atteint le Christ plus profondément que si nous le Lui faisions à Lui-même, étant donné que ce prochain, Il l'aime plus que Lui-même puisqu'Il s'es sacrifié pour lui ? Ainsi une mère est plus touchée par le bien ou le mal que l'on fait à son enfant que par celui qu'on peut lui faire à elle-même, car elle aime ses enfants plus qu'elle-même puisqu'elle se sacrifie pour eux...

Du reste, quel rêve d'amitié, d'union, d'entente, de fraternité, d'entraide peut dépasser le nôtre  ? Notre ambition ne doit-elle pas tendre, d'après le Christ, à être unis entre nous comme le sont les personnes divines au sein de la Trinité ? (cf. St, Jean, oh.17,v.11,21-22).

Quel idéal plus élevé que celui que nous propose le Christ quand Il nous dit : " Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait " (cf. St Matthieu, ch 5, v.48). " Soyez miséricordieux comme l'est votre Père du ciel !" (cf. St Luc, ch:6,V.36) ? Qui dit mieux ? imiter, copier Dieu Lui-même !

Beaucoup veulent promouvoir la justice entre les hommes. Notre Christ, Lui, nous demande de dépasser la mesure de justice en donnant aux autres, non seulement tout ce à quoi ils ont droit, mais plus que leur droit, justement en étant miséricordieux, en rendant le bien pour le mal, en aimant même nos ennemis !

Et qui peut dépasser notre idéal de franchise et de vérité puisque le Christ nous demande de dire toujours "oui" quand c'est "oui" et "non" quand c'est "non" ? Au point que, d'après le Christ, un chrétien n'a pas besoin de faire des serments (cf. St Matthieu, ch..5,v.33-37) : sa simple parole doit valoir un serment !

Qui peut proposer un idéal d'amour humain plus exaltant, plus en harmonie avec les aspirations les plus profondes, les plus nobles du coeur humain, que celui que nous propose le christianisme qui demande d'aimer l'autre d'un amour de même facture, de même qualité que celui dont nous aimons Dieu Lui-même " de tout ton coeur, de toute ton âme, de tout ton esprit, de toutes tes forces !" ?...

Qui prône davantage la valeur du don des corps ? Pour le chrétien, c'est l'expression même de cet amour exclusif, de cet amour d'adoration, l'expression de la donation totale de tout son être, de toute sa vie, à celui ou à celle que l'on adore  ! Ce don, pour le chrétien, a une valeur religieuse qui doit être reconnue et célébrée puisqu'il a une valeur d'absolu.

Qui peut pousser plus loin la fidélité de cet amour quand on sait que le Christ exige que cette fidélité ne soit pas seulement corporelle, mais qu'elle aille jusqu'à la fidélité de la pensée et du cœur ? (cf. St Matthieu, ch.5, v.27-28).

Pour mettre le feu à la terre, le Seigneur Jésus, non seulement nous apporte un idéal susceptible plus qu'aucun autre au monde de nous enthousiasmer, mais pour faire ailler de nos cœurs durs et froids comme la pierre l'étincelle qui mettra le feu, Jésus semble compter tout particulièrement sur le choc que sa Passion si douloureuse est capable de faire sur ces cœurs.

En effet, il semble qu'il y ait un lien étroit entre les deux phrases qui débutent cet Evangile : " Je suis venu apporter le feu sur la terre ... mais (sous-entendu : pour cela) je dois être baptisé d'un baptême, d'un baptême de sang, et je suis dans l'angoisse jusqu'à ce qu'il soit arrivé !" C'est le véritable sens de cette phrase d'après le Père Lagrange lui-même qui fut un des plus grands savants en Ecriture Sainte. Et le Père ajoute : " N'est-il pas assez touchant de penser que la vie de Jésus-Christ a été un Gethsémani perpétuel ?" (Commentaire sur l'Evangile de St Luc, p.373).

La plupart d'entre nous pensent que le Seigneur a souffert sa Passion pendant un jour, un jour et demi tout au plus ... et voici que ce texte d'Evangile nous révèle que cette Passion a duré 33 ans ! Il l'a endurée pendant toute sa vie. Dès les premiers instants, en effet, de sa vie d'ici-bas, Jésus savait ce qui l'attendait. Il en parle à plusieurs reprises et en détail à ses Apôtres et, ce texte nous le dit, Il en a souffert horriblement par avance ...

Oui, cette si longue et si douloureuse Passion du Seigneur, pour qui y réfléchit un tant soit -peu, est capable de susciter en nos cœurs une double flamme, une double ardeur !

D'abord un élan, une ardeur extraordinaire pour poursuivre la lutte entreprise par le Christ contre le mal sous toutes ses formes.

On nous dit que lorsque le Général Leclerc était à la tête de ses troupes, il les galvanisait par son audace et son courage. Ainsi en est-il du Seigneur Jésus ! L'Epître de tout à l'heure nous le présentait comme un entraîneur dans la lutte contre le mal. Les souffrances de sa Passion tant redoutées, Il a accepté "volontairement", nous disait le texte, de s'y exposer, ne craignant pas de prêcher son idéal, sa religion, malgré "l'hostilité des pécheurs" ... Et l’auteur de cette Epître d'ajouter à l'adresse des chrétiens pour lors persécutés  : " Vous, vous n’avez pas encore résisté jusqu'au sang dans votre lutte contre le péché !" Laissons-nous donc emporter par cet exemple de notre Chef, avec Lui fonçons malgré toutes les oppositions que nous pouvons rencontrer, soutenus aussi, nous disait cette Epître, par tous ces témoins, ces ancêtres qui, eux aussi, ont lutté pour leur Foi et qui, du haut du ciel, nous regardent et sont nos supporters  !

Surtout, surtout, cette longue et si douloureuse Passion que le Christ a endurée pour nous, elle doit susciter en retour dans nos cœurs une flamme, une passion pour notre Sauveur, un feu qui brûlera toute notre vie et qui se propagera de proche en proche... N'est-ce pas cette folie de la croix qui a déclenché dans le monde la folie du sacrifice, de la virginité, du dévouement, du martyre ... la folie de tous ces cœurs généreux qui ont voulu rendre à leur Dieu sang pour sang ?...

C'est notre rôle à nous, chrétiens, d’entretenir la flamme sacrée dans le monde. Si ce n'est pas nous qui entretenons cette flamme de l'idéal, de la foi, de la charité et de l'amour du Seigneur, qui donc l'entretiendra ?

Si nous, vos prêtres, nous aimons tant soit peu le Christ, si nous voulons réaliser son souhait le plus cher, notre souci primordial doit être de faire de vous tous des "incendiaires"  ! Pour ce faire, nous devons vous communiquer ce feu que le Christ est venu apporter sur terre, vous présenter sa religion dans toute sa beauté, dans toutes ses exigences, avec tout l'enthousiasme qu'elle doit provoquer. Si nous voulions tempérer cette flamme, bien vite elle charbonnerait et s'éteindrait...

Dans la première lecture de tout à l'heure, le prophète Jérémie nous était un exemple de refus de toute compromission. il n'a pas eu peur, lui, de prêcher à contre-courant et de crier " Mieux vaut pour le Peuple de Dieu ne plus avoir son indépendance politique et subir l'occupation étrangère, que de risquer de perdre sa foi !"...

Nous aussi, loin de nous mettre au goût de notre entourage et de nous laisser emporter par le courant, ne craignons pas, comme Jésus le disait, d'être en opposition même avec ceux qui nous touchent de plus près, gardons au message du Christ toute sa force, toute sa virulence, et que nos coeurs vibrent à l'unisson de celui du Seigneur et s'embrasent du même feu !

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